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Se regardant avec les yeux cassés de leurs fenêtres
Et se mirant dans l’eau de poix et de salpêtre
D’un canal droit, marquant sa barre à l’infini, .
Face à face, le long des quais d’ombre et de nuit,
Par à travers les faubourgs lourds
Et la misère en pleurs de ces faubourgs,
Ronflent terriblement usine et fabriques.
Rectangles de granit et monuments de briques,
Et longs murs noirs durant des lieues,
Immensément, par les banlieues ;
Et sur les toits, dans le brouillard, aiguillonnées
De fers et de paratonnerres,
Les cheminées.
Se regardant de leurs yeux noirs et symétriques,
Par la banlieue, à l’infmi.
Ronflent le jour, la nuit,
Les usines et les fabriques.
Oh les quartiers rouillés de pluie et leurs grand-rues !
Et les femmes et leurs guenilles apparues,
Et les squares, où s’ouvre, en des caries
De plâtras blanc et de scories,
Une flore pâle et pourrie.
Aux carrefours, porte ouverte, les bars :
Etains, cuivres, miroirs hagards,
Dressoirs d’ébène et flacons fols
D’où luit l’alcool
Et sa lueur vers les trottoirs.
Et des pintes qui tout à coup rayonnent,
Sur le comptoir, en pyramides de couronnes ;
Et des gens soûls, debout,
Dont les larges langues lappent, sans phrases,
Les ales d’or et le whisky, couleur topaze.
Emile Verhaeren